mercredi 13 avril 2011

journal d'un débourrage (rétrospective)

Voilà, ça fait donc un peu plus d'un an que j'ai commencé à éduquer Tadja, à raison d'un peu moins d'une séance par semaine, excepté l'été dernier où ce n'est pas moi qui m'en suis occupée et ce dernier mois où je la faisais travailler environ trois fois par semaine.
Un an, ça peut sembler long, démesuré même ! Mais si l'on rapporte au nombre de séance, c'est assez peu : 41. Ce n'est même pas beaucoup si l'on prend bien en considération que la pouliche n'était absolument pas éduquée au départ, qu'elle a tout de même un caractère difficile et qu'elle a aussi un trauma lié à son poulinage précoce. Chaque séance étant écartée l'une de l'autre, cela lui donnait l'opportunité d'enregistrer, mais aussi d'oublier, cela permettait plus difficilement de prendre l'habitude de...
41 séances représentent un mois et demi à deux mois en pension dans une écurie.
Dans les écuries, les chevaux sont entrepris régulièrement, tous les jours voire plusieurs fois par jours : Lorsqu'ils sont alimentés, que le box est nettoyé, qu'ils vont au pré (si ils ont la chance d'y aller s'entend) ils sont confrontés aux dresseurs qui les remettent en place dès que besoin, les encouragent si il le faut, créent des liens... Surtout règlent les problèmes à mesure en y revenant plusieurs fois par jour si il le faut... On peut multiplier les micro-séances qui permettent bien souvent un excellent apprentissage sans blaser le cheval.


Alors pourquoi avoir choisi ce procédé ? Tout d'abord, n'ayant pas de structure adéquate, il était logique qu'elle reste chez son propriétaire, qui lui en avait, bien que je n'ai pas pu en bénéficier tout le temps. Ensuite, la pouliche n'avait pas encore tout à fait trois ans au début et de plus souffrait très probablement d'un retard de croissance, donc il fallait lui laisser le temps de grandir, et de murir : il était hors de question de lui monter dessus dans les deux mois qui ont suivi notre rencontre, que se soit pour son physique ou pour son équilibre moral.
Mais, la pouliche avait un sérieux besoin d'être recadré puis éduquée. En faisant une séance ou moins, par semaine, la pouliche a eu le temps de tranquillement assimiler les choses, de grandir, de tester aussi. On a évité qu'un ras le bol du à un excès de contraintes sur un individu trop jeune la rende amorphe ou réfractaire (ça aurait plutôt été le deuxième je pense). Par rapport à certaines situations, il aurait été tout de même plus facile de pouvoir faire plusieurs toutes petites séances rapprochées, en particulier, tout ce qui concerne les manipulations (pansage et prise des pieds)


Les séances se sont rapprochées pour finir le travail lorsqu'elle a été prête mentalement à l'accepter. Cela a permis de favoriser la prise de muscle, lui a donné un meilleur cadre. C'est quand elle a commencé à faire presque systématiquement l'andouille en début de séance, que j'ai su qu'on pouvait, qu'on devait lui demander plus fréquemment de se concentrer et d'être à l'écoute. En ne rapprochant pas les séances, j'étais confronté au problème suivant que la pouliche s'amusait comme une petite folle au début, puis manquait d'énergie pour se concentrer sur son travail et donc progresser. D'autres auraient poussé alors sur les réserves de la pouliche pour faire avancer les choses. Cela lui aurait montré le travail sous un jour pénible et désagréable, procurateurs de courbatures et d'épuisement. Elle aurait pu alors, soit devenir un cheval qui se retient, s'économise à l'excès, car il aura appris que le travail lorsqu'on se donne, vide de toute énergie et peut être douloureux ; ou tout simplement un cheval qui refuse de se laisser approcher, voire qui agresse l'homme puisqu'il devient son ennemi. Approcher les séances, m'a permis de faire travailler une pouliche disponible : à l'écoute puisque dans le travail - donc très régulièrement recadrée et occupée n'éprouvant pas le besoin de jouer plus que raison - et qui n'était pas trop fatiguée.


Le travail c'est déroulé en trois grandes étapes :
- l'éducation : se laisser approcher, toucher, prendre les pieds, marcher au licol. (mais aussi, ne pas mordre, taper, menacer, foncer sur le deux pattes...)
- le prédébourrage : tourner en longe aux trois allures, marcher aux longues rênes, prendre le mors, accepter tapis/surfaix/selle. (Accessoirement, tolérer les "bêtises du deux pattes" comme monter sur un marche pieds et faire l'andouille dessus)
- le débourrage : accepter que le deux pattes lui monte sur le dos, comprendre la jambe et la main.
La première partie se révise, voire se refait, à chaque instant (on aura d'ailleurs vu que Tadja a eu besoin d'une rééducation) ; la dernière est difficile à séparer du dressage et j'aurais aimer la poursuivre un peu.


Pour conclure, j'ai eu la satisfaction de mener une petite sauvageonne mal aimable à faire mieux que tolérer les contraintes du deux-pattes, à devenir aimable et affectueuse, sans me battre, sans la briser, au contraire même je crois en encourageant les bons côtés de sa personnalité. C'est une battante, qui sauf stress trop important, réfléchit avant d'agir. Vive, démonstrative et dynamique elle est de ces chevaux dont la force de caractère, bien orientée, permet de faire de grandes choses. Sans compter qu'elle peut présenter beaucoup de chic et de jolies allures.


Lucien Gruss a dit "On peut faire plus vite, mais dans la mesure où l'on fait plus vite,  et là j'affirme ce que je dis, on brise la personnalité du cheval"
L'important est là : ne pas briser la personnalité du cheval ! Ou alors, il faut faire du vélo...



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