lundi 16 avril 2012

Une journée au lycée agricole (quatrième partie : Swan)

Je retourne dans la carrière avec un cheval du centre : Swan.
Swan est un petit cheval, taillé en poney : encolure courte et épaisse, plutôt bréviligne, articulations épaisses, bref, un petit équidé taillé en force, juste ce que je voulais pour étayer mes propos lorsque je travaillais avec Cobalt.
Swan a tendance à bousculer, tirer en main. 
Petit plus, quand il s'est débarrassé de son deux pattes, aussi bien à pied qu'à cheval il va tenter de le taper. Prise par le micro et la position inconfortable d'être debout au milieu de la carrière, j'oublie une question de première importance : quand il tape, il touche ou pas ? J'y reviendrais...


Je commence la séance par l'indispensable contact mano-nasal, et je passe la main sur tout le corps : Swan ne présente pas de contraction particulière, il a bon oeil et est confiant en main : un bon petit cheval sûr de lui... Ce peut être à la base du problème. Durant toutes les manipulations je garde une longe assez courte pour garder le contrôle de la tête et ainsi pouvoir détourner les postérieurs si il lui prenait l'envie de botter, mais sans le coincer. Il a aussi l'interdiction totale de bouger les pieds, il doit rester complètement focalisé sur moi.
Le premier contact vise à lui dire que je suis pacifique en premier lieu, et en second que j'entends ne pas me laisser marcher sur les pieds. Equilibre parfois délicat...


Je ne vais pas entrer dans les détails du travail car il est le même que pour Cobalt. 


Swan obéit plutôt bien, et comprend vite même sur une pression légère, mais il faut rester très vigilent. Swan a l'habitude de vivre sa vie sans se soucier du deux pattes, et cherche les appuis pour pouvoir utiliser sa force.


Le jeune homme que je fais travailler avec le cheval est tendu et prend d'entrée un contact assez rigide, peut-être prêt à utiliser de la force ce qui se retournerait contre lui, donnant un appui au cheval. 
Avec tous les chevaux, mais particulièrement avec ceux qui cherchent la faille, il faut rester vigilent, mais aussi très détendu : la tension, le stress se communiquent très facilement : si il vous sent stressé, il comprend que vous n'êtes pas sûr et ne vous considèrera pas comme un meneur valable.


La posture est aussi quelque chose de primordial, elle donne au cheval des indications simples sur ce qu'on attend de lui, n'oubliez pas que c'est le premier mode de communication du cheval.


Durant le travail, j'entends "c'est parce qu'elle le domine" Ben oui, mais attention !
Le mot domination est à prendre avec des pincettes avec le cheval. Je ne suis pas "le patron". J'ai établi un lien de confiance donc il se sent bien près de moi ; je lui ai expliqué que je tiens à mon espace, qu'il ne doit pas me dépasser, m'envahir, alors il me respecte (la domination se trouve ici, et ici seulement). S'il m'obéit c'est parce qu'il est en confiance à mes côtés et parce que cela lui apporte du confort. Par exemple, si je place mes doigts sur son poitrail et si j'appuie, le contact est désagréable, s'il suit leurs indications, la pression cesse : c'est du confort. 
S'il est en confiance à mes côtés, c'est aussi parce que je me place en dominant (équin) : cela signifie que je suis sûre de moi, que je suis moi même confiante. 




La nuance est importante, et j'arrive là à ce que j'ai omis de mentionner sur place. Si l'on cherche la domination pour la domination, on arrive facilement à utiliser la force ou au moins la contrainte, pire la violence. Ce n'est jamais bon, mais j'ai le sentiment que c'est ce qui coince en particulier avec ce cheval. Il a conscience de sa force et est d'un tempérament dominant. Une personne non crédible en tant que dominant qui veut appliquer une domination en force, une domination au sens humain, se voit, en toute logique équine remise à sa place. 
Il est très possible aussi, et là je pense que c'est en particulier lorsqu'il est monté, que la pression d'une contrainte continuelle et souvent mal appliquée le place en situation de stress, ou au minimum est trop fortement inconfortable. Notez que c'est toujours le cas, mais ici ce processus doit être renforcé par le fait que ce cheval est pourvu d'un caractère très fort d'une part, et d'une autre part, et là, je parle d'à cheval, il est probablement assez déséquilibré et on doit user avec lui de fortes aides de jambes et de mains. Quand la pression devient trop importante, il explose et étant donné sa puissance, jette ses cavaliers.
Le coup de pied donné ensuite à une importante signification : je ne pense pas que ce soit une ruade de fuite (certains chevaux ont peur quand leur cavalier tombe) cela ne correspond pas à son tempérament. Soit c'est un coup de cul libérateur, de joie, soit il y a une réelle volonté d'agression. Une attaque des postérieurs est un geste de défense (contrairement à un cheval qui charge) défense à une agression, à une invasion. C'est une forme de défense agressive. Autrement dit, il considère le cavalier comme son ennemi et le traite en conséquence : il répond à une agression préalable (aides trop fortes). Ce n'est qu'une supposition en ce qui concerne Swan puisque je ne l'ai pas vu au travail, ni ruer d'ailleurs.


En fait, j'ai tendance à croire que ce cheval est pris à l'envers, et il ne faut pas oublier avec lui la première règle à suivre avec les chevaux que pour bien travailler avec eux, il faut les aimer. Cela a été exprimé d'une excellente manière par Mme De Padirac à mon compagnon : "La première chose est de s'en faire un copain !"
Je n'ai eu aucune difficulté à manipuler ce cheval, mais pendant toute notre relation, je n'ai cessé de le caresser, de l'approuver dès qu'il faisait bien, de le respecter. Cela ne m'a pas empêcher de le sanctionner si besoin.


Aimez les chevaux avec lesquels vous travaillez !
"Faites du cheval un compagnon et non un esclave, vous verrez quel ami extraordinaire il est." Nuno Oliveira
"On a tendance, de nos jours, à oublier que l'équitation est un art. Or l'art n'existe pas sans amour.
L'art, c'est la sublimation de la technique par l'amour." Nuno Oliveira

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